Dans une plaine errait un paisible taureau :
Passe un mâtin, la rage en son cerveau
Bouillonne, son œil étincelle,
Sa gueule écume ; et son flanc animé,
Et ses jappements, tout décelle
La sanguinaire soif dont il est consumé.
D'un pied grave, imposant, l'autre pressait la terre.
Il s'arrête, et lui crie à voix haute : Crois-moi,
Fuis le combat, retire-toi.
Le mâtin répondit : J'aime et je veux la guerre ;
Élève d'un boucher, je n'ai qu'un seul désir,
C'est de vaincre ou bien de mourir.
Chien maudit ! les accès de ta rage indocile
Ne m'étonnent plus, suis ton sort,
Repartit le taureau tranquille ;
Au carnage exercé, donne ou reçois la mort :
Je vais répondre à ta requête.
Inclinant à ces mots la tête,
De sa corne il saisit, enlève l'impudent,
Fait craque sur son corps une invincible dent,
Et le secoue et le déchire.
Victime ainsi de sa fureur,
Périsse l'homme, aveugle en son délire,
Qui ne craint pas d'être agresseur !