Le Lion et le Loup Jean-Jacques Porchat (1800 - 1864)

Certain Lion pour son domaine
Cherchait un fidèle intendant.
D’un beau parc, bien peuplé s’entend,
Il serait le gardien ; on pairait bien sa peine.
Un Loup, digne intendant ! convoita cette aubaine ;
Produisit des certificats.
Au besoin qui n’en produit pas ?
Les siens étaient beaux. Sur son compte
Vingt maîtres qu'il avait servis
Se trouvaient tous du même avis.
Le Lion dit alors : « Mon cher, j’ai presque honte
D'exiger plus de sûreté ;
Mais c’est de ma maison l’usage héréditaire.
Il me faut un garant solvable et solidaire.
Cela vous convient-il ? » Le Loup dit: « Accepté.
Sur l'heure on peut vous satisfaire.
Un garant ? plutôt deux ! — Non, un seul me suffit.
Vite allez le quérir ; vous avez ma parole. »
L’autre alla donc ; mais il se morfondit,
Et le plus sot trouvait une excuse frivole.
Qui pour sauver sa bourse est en défaut d’esprit ?
Seulement un Renard, vieux, ripé, misérable,
Qui cherchait un os à ronger,
Chez l’intendant futur se réservant la table,
A charge d'être son berger,
Comme pleige à ce prix voulut bien s’engager.
Le Loup, confus de l'air canaille
De son fidéjusseur qui marchait devant lui,
Revint chez le bailleur présenter sa trouvaille.
Mais on lui rit au nez. « Quoi, c’est la votre appui !
Malpeste, un matador ! qui pour ses biens, je pense,
De son engagement craint peu la conséquence.
Je le connais de réputation.
C'est tout ce que j’en veux. Bonsoir ; plus d’intendance.»

A mauvais débiteur mauvaise caution.

Livre VII, fable 10




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