Le Pot à Moineaux Jean-Jacques Porchat (1800 - 1864)

Un Villageois devant son toit champêtre
Avait placé quelques pots à moineaux.
Connaissez-vous ces engins ? Non, peut-être.
Aux citadins tant d’objets sont nouveaux !
D'une bouteille au goulot du vieux style,
J'entends, bien large, et qui verse à grands flots,
Ils ont la forme; ils sont pétris d’argile,
Et, par leur base au mur assujettis,
Sont aux oiseaux des manoirs tout bâtis,
Ou les plus sots fixent leur domicile.
Abord commode, espace suffisant,
Paroi solide à l'épreuve du vent,
Tout les séduit. Mais la gent inhumaine
Pour les petits des oiseaux sans raisons
Prend-elle soin d’élever des maisons ?
Vous en doutez: c’est fort sage, et sans peine
Il ne faut croire à ces œuvres d'amour.
Voici venir deux jeunes Hirondelles.
L’endroit leur plait. « Agréable séjour !
Il semble exprès fait pour nous, disent-elles. —
Non pas cela, fit le maitre des pots,
En les chassant. Allez, oiseaux falots ;
Pour toutes gens toute auberge ne s’ouvre. »
Eux de s’enfuir. Après quelques moments,
Deux Passereaux, autre couple d’amans
Viennent encore, et le male découvre
Les mêmes pots. Les voir, c’en est assez
Pour les vouloir. Il entre, et sa femelle
D’en faire autant, et les voilà places;
Et les pauvrets ne furent point chassés.
« Pourquoi cela ? dit un jour l'Hirondelle,
Qui voletant les vit d’un œil jaloux.
Ces oiseaux-1a valent-ils mieux que nous ? »
Le lendemain, par la chasse entrainée
Au même lieu, prés de la cheminée
Elle voltige, et sent comme un fumet
L'oiseaux rôtis ; autour de la chaumière
Voit le zéphyr agiter leur duvet;
Et ne voit plus leur case hospitalière.
« J'entends, dit-elle, on ne saurait aimer
Dans certains lieux que gens bons à plumer. »

Livre VIII, fable 4




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