Les Pots à Feu Remacle Maréchal (1796 - 1871)

Comme, un soir, on illuminait
Brillamment à Liège (c'était
Sous l'empire, à propos d'une grande victoire,
De celle d'Austerlitz, si j'ai bonne mémoire),
Des pots à feu tout fiers, au sommet d'une tour,
Criaient : « Admirez-nous ! Que de tout alentour
On rende hommage à notre gloire !
Oh ! comme, comparée aux hautes régions
Que, rivaux du soleil, inondent nos rayons,
La ville en bas doit sembler noire !
Voyez ! voyez !.. » Alors chacun se rengorgeait ;
C'était à qui le mieux brillerait, flamboierait,
Mais aussi, par malheur, à qui d'eux s'en irait
Le plus tôt ; et la chose à comprendre est aisée :
Comme on sait qu'en haut lieu le vent souffle et bruit
Bien plus fort qu'en bas, il s'ensuit
Que leur flamme par lui sans relâche attisée
D'autant plus vite fut usée.
Il sonnait à peine minuit
Que déjà l'on voyait leurs beaux feux en grand nombre
S'évanouir au sein de l'ombre,
Puis bientôt disparaître tous,
Ayant pour tout mérite ébloui dans leurs trous
Quelques chauves-souris et deux ou trois hiboux
Charmés de revoir la nuit sombre.
Mais, bien vivace encor, sur le pavé glissant
De la rue, à travers la vitre tutélaire,
De sa douce lumière
La modeste chandelle éclairait le passant.

Humbles vertus du sage, oh ! combien je préfère
Votre paisible éclat au faste éblouissant
Des vaines grandeurs de la terre !

Livre II, fable 8




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