Les courtisans du vieux Giton
A table un jour chez lui célébraient sa richesse.
Ecoutez-moi, leur dit l’amphitryon :
Un paon (le moins sot de l’espèce)
Était las de sa queue, et s’en plaignait sans cesse.
Ce poids m’est inutile, et souvent il me nuit.
S’il me plaît d’être seul, pour le voir on me suit.
Veux-je prendre le vol, à la terre il m’enchaîne,
Et, lorsque au bois je me promène,
Des buissons il est déchiré.
— Mais j’éblouis les yeux ! je me vois admiré! —
Il est vrai, je suis un beau sire;
Ma queue a, dit-on, mille appas…
Eh! que m’importe qu’on l’admire?
Je l’étale, et ne la vois pas. —
Je suis cet oiseau-là, messieurs; et la vieillesse
Ne me laissant de la richesse
Que le fardeau, que les dégoûts,
Giton porte la queue : elle brille pour vous.