LE PRÉSIDENT OUVRE LA SÉANCE
« O ! que la nuit est belle, et comme elle est aimable !
Tout dort autour de nous ; on n'entend aucun bruit.
Que le jour, au contraire, est triste, insupportable !
Répondez, oiseaux de la nuit ? »
UN PETIT HÍBOU
« Le jour seul enfanta la famine et la peste !
Aussitôt qu'il est de retour,
On se tourmente, on se déteste,
On se querelle : à bas le jour ! »
UNE CHOUETTE (en grassayant)
« A bas le jour ! que je l'abhorre
Il me déchire : il me fait mal aux yeux.
Et mes attraits jamais ne sont plus radieux
Qu'avant le lever de l'aurore. »
CHOEUR DES HIBOUS ET DES CHAUVES-SOURIS
« À bas l'astre du jour au visage vermeil !
Six grands mois de prison, deux mille écus d'amende,
Et, de plus, forte réprimande,
À quiconque osera protéger le soleil. »
LE PRÉSIDENT
« C'est décrété, messieurs, suivant votre ordonnance ;
A dater d'aujourd'hui, plus de jour désormais ;
Et, contre le soleil, sévissez d'importance,
S'il ose, parmi nous, se présenter jamais. »
Le soleil, cependant, vint éclairer le monde ;
Mais les oiseaux de nuit restèrent dans leurs trous ;
Et malgré leurs clameurs, leurs cris et leur courroux,
Phoebus anima tout de sa chaleur féconde.