L'Oison législateur Lambert Ferdinand Joseph Van den Zande (1780 - 1853)

Un Oison, las de son obscurité,
Voulant se faire un nom par quelque nouveauté
Et devenir un oison d'importance,
Parla d'indépendance,
Et dans la basse- cour prêcha l'égalité.
Cette doctrine plut aux jeunes volatiles ;
Plus d'un canard devint républicain,
Et les poules aux coqs ne furent plus dociles.
Une fois la révolte en train,
On réclama les droits de la nature ;
Notre législateur assembla les oiseaux :
-Frères, dit-il, si nous sommes égaux,
Chassons le paon ; son orgueil, sa parure,
Blessent mes yeux, à nos droits font injure.
Le paon fut à peine exilé,
Que le dindon, stupidement gonflé,
Se présenta piaffant et déployant sa roue.
« Oiseaux régénérés,
S'écria le brouillon, le coq d'Inde se joue
Des principes sacrés ;
Fier comme un paon, le voilà qui s'avance ;
Qu'il soit proscrit. » Il le fut par sentence.
On le chassait, lorsqu'on vit le chapon
Prendre à son tour un air de suffisance.
Ce dernier trait guérit la folle engeance :
Mettez, dit un vieux coq, à profit la leçon ;
Mieux vaut l'orgueil du paon que celui du dindon.