Différents Animaux contestaient de leur prix ;
Et chacun d'eux, selon l'usage,
A vanter ses talents égayait ses esprits,
Et n'estimait que son ouvrage.
— Je suis, dit le Castor, architecte et maçon.
Mes travaux sont connus. Je fais une maison ;
Je construis une tour ; je bâtis un village.
Faut-il franchir un fleuve, un torrent qui ravage ?
Je jette un pont de bois de l'un à l'autre bord,
Et je passe à pied sec. — Vous maçonnez ? d'accord,
Lui dit en bourdonnant l'Abeille.
Mais ce n'est pas une mers-Mile
Qui vous puisse égaler à la fille du ciel,
Qui forme avec un art que partout on admire
Des gâteaux parfumés de miel.
Eh ! que seraient, la nuit, vos maisons, sans ma cire
Qui répand un éclat semblable aux feux du jour ?
— Avez-vous fini, ma commère ?
Dit le Ver à soie à son tour.
Vous distillez, la chose est claire,
Et votre miel semble assez doux.
Mais de grâce, composez-vous
Ces fils si beaux, si fins, dont la trame légère
Façonne des tissus brillants,
Qui parent les autels, les belles et les grands ?
La Fable ne dit point si l'on prit un arbitre
Pour vider ces graves débats.
Chacun sait que sur ce chapitre
L'esprit d'auteur ne cède pas ;
Et, quelque bons que soient les ouvrages des autres,
Les meilleurs sont toujours les nôtres.