Un vendeur fort accommodant,
Pour le prix le plus ordinaire
Se défaisait d’un beau cheval normand,
Qu’il avait de Falaise emmené nuitamment,
Sans l’avis du propriétaire.
Celui qui se fournit aux dépens du prochain
Peut, sans perte, vendre à sa guise,
Et, content d’un honnête gain,
A très-bas prix livrer sa marchandise.
Ainsi fit du cheval l’habile trafiquant.
« Le garantissez-vous? » dit l’acheteur prudent,
Quoiqu’au fond du marché fort aise.
— « Sans doute, répond-il,
pourvu que cependant
Vous ne passiez pas par Falaise ! »
Nous avons plus d’un écrivain
Qui des travaux d’autrui fort lestement s’empare ;
Qui pille, prend de toute main .
Et, fier de ce riche butin,
D’un bien si mal acquis naïvement se pare.
Dites à ces gens-là : « Ce vers est-il de vous ?
» Cette pensée est-elle, en tout honneur, la vôtre ?…
L’auriez-vous par mégarde empruntée à quelqu’autre. »
— Eh! quoi! » répondront-ils sans aigreur, ni courroux .
Ne sait-on pas quel scrupule est le notre?…
Ces pages sont à moi ! J’en fais ici serment !
Nul n’affirmera le contraire...
A moins qu’on n’ait lu cependant
Pascal, La fontaine ou Molière ! »