« Où vas-tu, gentille Marie,
Dans, cet ajustement coquet?
— Laissez-moi, monsieur, je vous prie,
Ma sœur aujourd'hui se marie,
Et je viens cueillir un bouquet. »

Et soudain la petite folle
Dans mon parterre entre en chantant ;
Et tel un papillon frivole .
Passe de fleur en fleur et Vole
Sans se fixer, fat inconstant ;

L'espiègle ainsi met au pillage
Lis, rose, iris, pavot, jasmin ,
Et fait un informe assemblage
De fleurs, de boutons, de feuillage,
Qui tient à peine dans sa main.

« Donne-moi, lui dis-je, ô bel ange,
Cet énorme paquet de fleurs. »
Puis, j'en choisis et j'en arrange
Quelques-unes dont je mélange
Avec art les vives couleurs;

« Prends ce joli bouquet, ma chère,
Dis-je à l'enfant ; mais tri le vois,
Tout cueillir, c'est la moindre affaire ;
Dans les choses qu'on veut bien faire,
Il faut du goût, il faut du choix. »

De ce conseil à la fillette,
Ami, tu devrais profiter:
Follement ta muse indiscrète
Épànd ses trésors, et les jette
A chaque page et sans compter.

Tant de richesses entassées
Forment un tout disgracieux ;
Mais choisis entre tes pensées,
Et, fleurs avec, art nuancées,
Elles plairont à tous les yeux.

Livre V, Fable 9, 1856


Dédié à un jeune poète.

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