Un chêne, avec majesté,
De sa tète séculaire
Couronnait un bosquet écarté, solitaire,
Qui par son maitre un jour fut visité.
« O maitre! pour grandir nos tiges s’évertuent.
Vous le voyez, crièrent et la fois
Mille arbrisseaux répandus dans le bois ;
Mais à plaisir les vieux arbres nous tuent ;
Les grands étouffent les petits;
Nous aimons mieux qu’on nous mette en taillis.
Pour roi laissez-nous ce beau chêne ;
Coupez le reste et faites moisson pleine. »
Le baronnet goûta fort cet avis.
Depuis longtemps une large dépense
Avait amoindri sa finance.
« Ma fille ainée est bonne à marier,
Dit-il à son frère est prêt à guerroyer.
- Pour mettre en paix le royaume d’Espagne,
Sous d’Angoulême, il va faire campagne.
Allons, baron, plus de souci;
Tu vas trouver ici
La dot et l'équipage. »
N’a pas qui veut cet avantage.
L’hiver suivant le bosquet disparut ;
Le chêne resta seul; mais plein d'inquiétude,
Roi dépouillé, dans cette solitude,
Quel fut ton sort quand Borée accourut ?
Tu tombas comme le chêne
Qu’autrefois La Fontaine.
Dans un brillant tableau
Avec le Roseau,
Mit en scène.
« Place à nous, plus de grands ! Vive l'égalité ! »
Des petits sur la Terre,
Tel est le cri de guerre.
Qu'on cède à leur envie, adieu la royauté ;
A tous les coups le prince reste en butte ;
Bientôt la terre au loin retentit de sa chute.

Fables, 1847, Fable 16




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