Au pied d'un chêne centenaire,
A plaisir un pourceau de glands s'était gorgé,
Et, roulant sur le sol, ainsi que d'ordinaire.
Il s'était , pour dormir, tout à l'aise allongé.
En s'éveillant il imagine
De fouiller du museau le sol de la racine.
« Mais l'arbre en va souffrir ! dit un corbeau perché
Parmi les rameaux du vieux chêne.
Sur la racine, hélas! si ta dent se déchaîne,
Le tronc va périr desséché
— Eh! laisse-le périr! dit le pourceau, qu'importe !
Faut-il donc, pour si peu, se tracasser ainsi ?
Pour moi, qu'il crève ou non, la perte n'est pas forte.
Pourvu qu'on ait des glands, que j'en ramasse ici
Assez pour m'engraisser, voilà tout mon souci !
— A qui donc, dit le chêne, as-tu du ton bien-être ?
Si ton groin vers moi pouvait se redresser,
Tu verrais que ces glands qui te font engraisser,
Ingrat , c'est moi qui les fais naître ! »
Aux arts, à la science un ignorant esprit.
En tout lieu fait ainsi la guerre ;
C'est de leurs fruits qu'il se nourrit.
Mais le sot ne s'en souvient guère.