Fier d'avoir pour abri le sommet protecteur
D'un robuste et superbe chêne,
De la foret puissant seigneur,
Un jeune frêne '
D'un faux air de pitié regardait un ormeau
Dont le vent en tous sens secouait le branchage.
— Que je te plains, pauvre arbrisseau,
Lui disait-il en son langage,
Que ton sort diffère du mien I
Sur le bord du chemin, sans abri, sans soutien,
Le moins fougueux des vents précurseurs de l'orage
T'agite et te tourmente, et, pour comble d'affront,
Jusqu'à terre souvent te fait courber le front.
Je crains bien qu'un jour la tempête
D'un coup ne t'abatte la tète.
Offensé de ce ton, l'ormeau
Au discoureur allait répondre :
Il était prêt à le confondre,
Quand deux bûcherons du hameau
Viennent saper le pied du chêne
Qui d'abord vacille un moment,
Et qui, presque aussitôt avec fracas tombant,
Dans sa chute entraine le frêne.