Avant que Vulcain le boiteux,
Qui forgea le premier tonnerre
Dont Jupin, le maître des dieux,
Extermina les géants de la terre,
En récompense en eût reçu Cypris,
Un autre dieu reçut un plus grand prix
Pour quelque autre service insigne.
Si je dis qu'il en était digne
que le fait est sûr, sans trop l'approfondir
Il faut m'en croire. Or, il pouvait choisir
Entre Vénus, les Grâces et Minerve.
Amour, viens échauffer ma verve :
Qui peut peindre sans toi tout l'attrait du plaisir ?
Les bras entrelacés le cortège des Grâces,
Qui toujours de Vénus précède ou suit les traces,
Parut d'abord en un grouppe enchanteur :
Leurs appas, frais comme une fleur
Qui sous les yeux viendrait d'éclore,
Laissaient espérer le bonheur
De les voir s'embellir encore.
Toutes trois dans son cœur l'emportaient tour-à-tour,
Quand tout-à-coup parut la déesse d'amour.
Jamais on ne la vit si belle :
Elle offrait dans un nouveau jour
A chaque mouvement une grâce nouvelle.
Mais qui peut retracer les charmes de Vénus ?
Elle avait ce jour-là mille attraits inconnus
Nés du désir d'assurer sa conquête :
Tout l'olympe en était surpris.
Pour rendre son amant plus vivement épris,
Avec un doux sourire en inclinant la tête
(Comme autrefois devant Pâris,
De la beauté lorsqu'elle obtint le prix),
Elle allait à ses yeux dénouer sa ceinture,
Abri charmant des jeux, des grâces et des ris
Déjà du jeune dieu la défaite était sûre :
Heureusement pour lui soudain
(Je dis heureusement, car on sait l'aventure
De Vénus et de Mars, et le sort de Vulcain),
Soudain parut Minerve, à l'air doux et modeste,
Au maintien noble, au front plein de candeur.
D'un sentiment plus pur elle enflamma son cœur,
Et de ses premiers feux sut étouffer le reste.
Il sentit un charme secret
Qui vers Minerve l'attirait
Malgré tous les efforts de la belle déesse
Tel est, dès qu'elle paroît,
Le pouvair de la Sagesse.
Humains, pour être heureux, tâchez de l'acquérir,
Si sa recherche est longue, au moins est-elle sûre :
Si c'est chez vous un don de la nature,
Tâchez encor de l'embellir.