Un jour, sur la montagne annonçant l'Évangile,
Jésus fut surpris par la faim ;
S'écartant de la foule, il aperçut enfin
Un figuier... un figuier stérile.
« Apprends, dit le Seigneur, apprends, figuier maudit,
Que tout arbre stérile est indigne de vivre.
Et qu'aux feux éternels il faut que je te livre... »
En tremblant aussitôt le figuier répondit :
»Révoquez, ô Seigneur, la fatale sentence !
Sur l'aride rocher je reçus l'existence ;
Je courbai mille fois mes rameaux agités
Sous le vent des hivers, sous le feu des étés ;
Jamais une onde fécondante
N'infiltra sous mes pieds une sève abondante ;
Jamais la main du vigneron
Ne détruisit la ronce attachée à mon front :
Or, n'ayant rien reçu, que pourrais-je vous rendre !
Il dit ; alors, sans plus attendre,
Jésus, de sa justice apaisant la rigueur,
L'arrache et le transporte au pied de la montagne.«
Où, prospérant bientôt sur un sol producteur,
Il donna par milliers des fruits au voyageur.
Combien de parias que la honte accompagne,
Sur le roc du malheur rameaux abandonnés,
?végéter sans fruits semblent prédestinés !
Loin de les condamner au vent de l'nathème,
De la manne des arts qui pleut sur vos élus.
Riches, versez sur eux l'ineffable baptême :
Cultivez-les, vos soins ne seront pas perdus.