Combien cette fleur est jolie! »
Disait à sa mère chérie
Naïve enfant, ange aux yeux bleus ;
Mère, permets que je la cueille;
En elle tout est gracieux
Et pistil et corolle et feuille. »
La mère répondit oui des veux.
Et l'enfant de ses doigts de rose ,
Joyeuse du consentement,
A cueillir la fleur se dispose ;
Mais, ô prodige ! au même instant
Tout entière a frémi la plante ;
La fleur rentre en elle et, tremblante,
Comme pour lui faire un rempart,
Chaque feuille autour se resserre.
L'enfant s’arréte émue ; — « O mére !
Donne a cette plante un regard, »
Dit-elle ; « Vois donc ! sur sa tige
La fleur frissonne et semble fuir ;
Plus je n’ose, hélas! Ja cueillir ;
Parle ! explique-moi ce prodige ! »
Au moindre contact cette fleur
Qui te charme et fait ton délice,
Ainsi referme son calice
Pour sauvegarder sa fraicheur.
Ma fille ! prends-la pour ton symbole;
Imite l’instinct de pudeur
Qui protège sa corolle,
Si tu veux garder ta candeur,
Quelle soit ton constant modéle!
» Au moindre contact, tout comme elle,
» Enfant , ferme avec soin ton cœur ! »

Livre I, fable 10


Jardin d'Essai, 8 Juillet 1853.

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