O nature ! ô bizarrerie !
Dans l'homme je vois cent travers !
Des animaux j'admire l'industrie
Et les caractères divers,
Tout me surprend, tout est problème,
Tout m'instruit, jusqu'au nain, jusqu'à sa bosse même.
Quel est ce petit animal
Que je vois s'avancer tout plein de suffisance ?
Ses jambes de travers et son pas inégal
Le font clopiner en cadence.
C'est un homme, un bossu... nez crochu, de gros yeux,
Bouche de faune et de longs bras de singe ;
Je le plains ! il doit être ou sot, ou malheureux,
Cependant, il a l'œil vif et fin, l'air joyeux ;
Sa mise est élégante, et superfin son linge.
Voyons sa bosse... O vanité!
Un coussinet, corrigeant la nature,
En remplit l'inégalité.
Ciel ! quelle grotesque tournure !
À la mode sont ses habits,
Ses cheveux et ses favoris ;
Il ne se croit pas si difforme.
Je remarque encor son chapeau ;
11 est d'une hauteur énorme !
C'est pour paraître un peu plus grand, plus beau.
Mais qu'entends-je ? ô travers ! des passants, sans scrupule,
Ce monstre-là médit, trouve tout ridicule !
Un cocher lui dit: « Gare... eh ! petit, range-toi...
— Petit ? butor ! répond-il et recule,
Va, l'on en voit de plus mal faits que moi ! »