Le Dogue et le Pigeon Remacle Maréchal (1796 - 1871)

Devant accompagner de la ferme un valet
Qui s'en allait
Vendre vingt moutons gras à la ville prochaine,
Houzard venait de voir tomber la lourde chaîne
Qui, depuis un mois, par le cou,
Le tenait captif en son trou,
Et d'allégresse, comme un fou,
De la grange au fenil, du fenil à la plaine,
Courait et recourait sans trêve, à perdre haleine,
Faisant de ses joyeux abois
Retentir les champs et les bois.
Un pigeon l'ayant vu du haut de sa demeure,
Avec un long soupir se dit : « Oh ! qu'à cette heure
Je sens bien tout le prix de ma félicité !
Voyez que de bruit fait là-bas le pauvre dogue,
Las ! parce qu'on lui donne un jour de liberté !... »
Et, du Ciel envers lui bénissant la bonté,
L'oiseau gaiment s'envole après ce monologue.

M'est avis que, chez nous, sans la moralité,
On peut finir cet apologue.

Livre IV, fable 19




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