Le Loup et le Dogue Jean-Jacques Boisard (1744 - 1833)

Un Loup remplissait l'air de ses cris douloureux :
De tous côtés je fuis bien malheureux !
Qu'est devenu ce tems où d'immenses armées,
Par le glaive et la faim sans cesse consumées,
Nous fournissaient des repas somptueux ?
Pour le malheur de tous tant que nous sommes,
Une paix générale a réuni les hommes !...
Pas le moindre cadavre !... Hélas ! je flaire en vain...,
Tout vit dans la nature !... Il faut mourir de faim !
Car où porter mes pas ? Pour comble de disgrâce,
Tous les troupeaux sont protégés
Par des Chiens vigilants, des Chiens de forte race,
Par qui j'ai vu cent fois mes pareils égorgés
Comme il disait ces mots, un Dogue épouvantable
Qui l'entend, fond sur lui, de rage étincelant :
Meurs, lui dit-il, en l'étranglant ;
Et meurent comme toi, brigand impitoyable,
Tous ceux qui, comme toi, meurtriers dans le cœur
Dans le bonheur public ont trouvé leur malheur !

Livre II, fable 4




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