Sur la côte un vaisseau venait de se briser.
Tout l'équipage en pleurs s'efforçait d'apaiser
Par des cris et des vœux la céleste colère :
C'est fort bien fait, leur dit le pilote irrité,
De leur extravagante et lâche oisiveté,
Que d'invoquer les dieux ; mais vous pouvez mieux faire :
Que chacun sur mes pas et ceux des matelots
Dans le sein de la mer s'élance avec courage ;
Et bravant la fureur des flots
S'efforce ainsi de gagner le rivage.
De vous et de vous seul dépend votre salut.
Les dieux vous ont armés et de force et d'adresse ;
Dans cette cruelle détresse
Usez-en donc. Chacun le crut,
Et chacun fut sauvé. Par sa sublime audace
Le sage nautonier leur fit trouver le port.
S'ils fussent demeurés tranquilles à leur place,
Leurs vœux les eussent-ils délivrés de la mort ?