La Rose blanche et le Papillon Albéric Deville (1773 - 1832)

A l'ombre d'un épais taillis,
Croissait une Rose charmante
Dont la blancheur éblouissante
Aurait fait honte au plus beau Lis.
Un galant Papillon s’étant approché d’elle,
Lui dit d’un ton léger: «Qu’avez-vous donc, ma belle ?
Eprouvez-vous d’amoureuses langueurs?
Bien que piquante, en vérité, je n’ose
Vous décorer du nom de Rose;
Vous avez les pales couleurs!»
De ce propos sans conséquence
Une autre fleur eût pu rougir...
Mais la timide Rose avait son innocence ;
Elle n’exhala qu’un soupir.
Choqué de son silence,
L’ami de l'inconstance
Alla plus loin courtiser le Plaisir.
Cette Rose était si jolie,
Qu’un amateur en orna son jardin ;
Il l'arrosait soir et matin ;
Un treillage empêchait qu'elle ne fat cueillie;
Et Zéphire, déjà, la trouvait embellie ;
Du blond Phébus la féconde chaleur
De son teint virginal effaça la blancheur ;
Sa corolle devint vermeille ;
En la voyant chacun cria : Merveille !
Et bientét cette aimable fleur
A ses attraits dut son bonheur.
Que de Beautés dans l’ombre abandonnées,
Pourraient jouir d’un sort pareil !
D’éclat pour être environnées
Que leur faut-il ? Un rayon de soleil.





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