Messer Loup un beau -jour sortit de ses forêts ;
Ce loup était savant, plein de philosophie :
Il avait lu que dans la vie
Le vrai bonheur vient Je la paix ;
Mais la paix, disait-il, n'est jamais le partage
D'un être affamé de carnage.
Je prétends adoucir et réformer mes mœurs,
Protéger les troupeaux, défendre les pasteurs,
De l'état social prendre la politesse...
Mes aïeux, remplis de rudesse,
Ont croqué les moutons ; moi je yeux les garder.
Le fermier n'a qu'à commander.
Le dogue que l'on dit et vaillant et fidèle,
Le dogue sera mon modèle ;
Je prétends mériter et l'estime et l'amour
De tous l'es moutons d'alentour,
candis que sagement raisonne ainsi le sire,
Un berger passe, et le loup de lui dire
Et son plan de réforme et tous ses beaux projets ;
Comment pour le servir il quitte les forêts,
Le berger l'applaudit, et bientôt lui confie
La garde de la bergerie.
D'abord le tout, alla fort-bien ;
Notre loup pythagoricien
Ne mangeait que de l'herbe. Une telle abstinence
Le fit maigrir Lorsque vide est la panse,
On réfléchit,
Et l'on se dit :
Bien sot est celui qui maigrit,
-Quand il peut s'engraisser. Le loup ne s'en fit cure
Et revint franchement à la loi d'Epicure ;
Si bien que, reprenant ses appétits gloutons,
Un jour il croqua les moutons.

Un loup est toujours loup, il faut qu'on s'en méfie,
Ces beaux mots de réforme et de philanthropie
Ne font rien à l'affaire. Par ainsi gardons-nous
J>e mettre nos troupeaux à la garde des loups.

Fable 10




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