Le Lièvre et la Perdrix Alexis Rousset (1799 - 1885)

Le lièvre et la perdrix causaient
En se contant leurs aventures.
Ce sont de bonnes créatures,
Qui, tout en contant, se plaisaient
A se donner force louanges :
Ils s'en donnaient de bien étranges.
-Ah ! disait la perdrix, que d'ennemis cruels
En veulent à nos jours, les menacent sans cesse !
Le loup vorace et l'homme aux coups prompts et mortels,
Le vautour, le renard plein de ruse et d'adresse,
L'aigle accourant du haut des cieux,
Tous ces méchants nous font la guerre à qui mieux mieux.
Qu'opposons-nous à tant de rage ?
Contre tant d'ennemis, qu'avons-nous ? Le courage.
Mais nous en sommes bien pourvus.
-Exemple, dit le lièvre : hier, j'ai mis en fuite.
Par de soudains crochets et des bonds imprévus,
Six chiens lancés à ma poursuite :
L'admirable combat ; j'étais seul contre six !
-Bien mieux, ajouta la perdrix,
L'autre jour j'étais poursuivie,
En danger de perdre la vie ;
Mais, ne redoutant point un glorieux trépas,
J'enfilai bravement un chemin de traverse
Que suivait un chasseur... il tombe à la renverse :
Le lâche, à mon aspect, avait fait un faux-pas.
Oh ! ce fut une chaude affaire. -

Hélas ! on ne se targue guère
Que des vertus que l'on n'a pas.

Livre III, fable 2




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