Un Loup, des plus gloutons, ravageait la prairie,
Et dépeuplait la bergerie ;
Mais le voleur, à la course léger,
Se dérobait au chien comme au berger,
Quand par hasard Fidèle, au retour delà chasse,
Rencontre le larron dont il cherchait la trace :
« — Vous voilà, dit le Chien, et j'en suis enchanté;
Suspendons entre nous la guerre,
Comme deux bons amis causons en liberté. »
— Trêve, répond le Loup, j'y consens. »—Eh bien ! frère,
Repart le Chien, avec tant de valeur,
Et portant une âme intrépide,
Pourquoi vous adresser à l'espèce timide ?
De vos exploits quel est l'honneur ?
Que vos dents trouveraient un plus noble adversaire
Près du sanglier, du lion !
Est-il digne de vous de combattre un mouton,
Ou bien le jeune agneau qui tette encor sa mère ?
Le lâche peut avoir semblable cruauté,
Mais un grand cœur a plus d'humanité. «
« — Ami, répond le Loup, si tu te mets en peine
De cette gent qui porte laine,
Tu peux trouver en pareil cas
Le moyen d'exercer ta langue ;
« Va trouver l'homme de ce pas,,
Et lui débite ta harangue ;
Attendris-le par tés discours touchants,
Ton éloquence alors sera bien plus utile ;
Contre un mouton par nous mangé de temps en temps,
L'homme en dévore plus de mille. »