Deux rats dans un grenier trouvaient maigre pitance ;
Sur l’humide carreau, pour toute subsistance,
Des malles, des coffrets, du vieux linge à ronger
Étaient les meilleurs mets de leur garde-manger.
Seriez-vous japonais ou natif de la Chine
Qu’un jeûne prolongé n’engraisse pas l’échine.
Nos rats à grignoter les coffrets jusqu’aux clous,
Avaient leurs os pointus comme piquants de houx.
Ils allaient déserter le nid de leurs ancêtres,
Le paquet sous le bras, lorsque par les fenêtres
L’avaine, le maïs, les orges, le froment,
À leurs yeux éblouis plurent subitement.
Le stérile grenier un temple d’abondance,
On rentra les paquets : les rats firent bombance.
Ils festoyaient gratis, enchantés du butin ;
Une chatte troubla le plantureux festin.
Ennemie aux aguets, sournoisement perfide,
Elle n’entrait jamais dedans le grenier vide ;
Le grain lui rappela qu’il est certains rongeurs,
Friands de blés nouveaux ; lors sus à mes voleurs.
Mistress Grippe-Souris happa les gais convives,
Son gosier engloutit leurs pauvres œuvres vives.

Très souvent nous voyons un étonnant bonheur
Remorquer à sa suite un terrible malheur.’

Livre I, Fable 5




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