Les Voyelles et les Consonnes Auguste-Alexandre Simon (1791 - 18**)

Dames voyelles de tout temps
De l'alphabet ont porté la couronne :
Sans elles pas un mot à l'oreille résonne,
Sans que l'une des cinq ne se trouve dedans.
A leurs puissantes sœurs les consonnes, dociles,
Quoi que bien moins utiles,
Dans les mots enlacées ont aussi leur valeur,
Tiennent leur rang avec honneur,
Mais voilà que l'orgueil s'empare des voyelles.
Qu'avons-nous besoin d'elles
Dit l'A, qui tramait mi Complot ;
Peuvent-elles sans nous composer un seul mot ?
Prenons dans l'alphabet les cinq premières places :
Que dans toutes les classes,
Quand les enfants épelleront,
En tête ils placent noire nom.
Cs rang, qui plus que nous à bon droit le mérite ?
Les consonnes viendront ensuite.
On applaudit à ce discours.
L'orgueil, bon Dieu ! régnera donc toujours ?
Mais dans la foule des consonnes
Un long murmure s'éleva ;
Quoique patientes et bonnes,
L'injustice les souleva.
Le sang allait couler, quand un X, plus sage,
Adresse ces mots aux deux camps :
Voyelles, redoutez des consonnes la rage ;
Vous ne l'ignorez pas, les petits font les grands.
Pour conserver des mots les douces harmonies,
Restons, mes sœurs, toujours unies.
Dieu nous a dit, la paix soit avec vous !
Petits et grands, embrassons-nous.
Et soudain on s'embrasse.
Puis le ciel aux hommes accorder celle grâce !...
Pour éviter les révolutions,
De l'X, en certains lieux, donnez-nous les sermons.

Livre IV, fable 19




Commentaires