Qui n’aime à voir folâtrer ses enfants ?
Nous le fûmes aussi. C’est une jouissance
De pouvair quelquefois se rappeler ce temps
Si regretté toujours, bien qu’il ait ses tourments.
Un rien suffit pour amuser l’enfance ;
Mais dans ses jeux, plus qu’on ne pense,
S’introduisent déjà Les passions des grands.
Un jour, échappés du collège,
Des écoliers d’onze ou douze ans,
Aperçurent un tas de neige,..
Le plus âgé, qu’on avait nommé roi,
Dit que de son pouvair il en faisait le siège,
Le trône enfin ; et le cortège
Donne à ce vœu force de loi.
Le trône était froid comme glace ;
N’importe, avec plaisir s’y place
Cette éphémère majesté.
On s’enivre de la puissance…
Peut-on impunément avair l’autorité?
Chez notre prince, l’insolence
Surpasse encor la dureté :
Des malheureux sujets la moindre négligence
Est réprimée avec sévérité.
De Tarquin le Superbe il avait l’arrogance ;
Et de Néron, plus tard, selon toute apparence,
Il aurait eu la cruauté.
Pourtant le soleil le dérange:
Le trône, qui se fond d’une manière étrange,
Avant la fin du jour s’abat.
Bientôt l’orgueilleux potentat
Se voit au milieu de la fange.
Profitez de cette leçon,
Vous que la fortune protège ;
Vous êtes sur un tas de neige…
Du soleil gare le rayon !