Un lion, malgré son grand âge,
Et n'ayant point d'enfants,
Voulut encore, au déclin de ses ans,
Dans les combats signaler son courage.
Un renard favori d'un jeune lionceau,
Espérant mieux sous un règne nouveau,
Sur ce point là, consulté par le sire,
S'empressa d'approuver ce projet, et de dire,
A sa majesté lion :
Qu'une si noble ambition
Etait un sûr garant de plus d'une victoire,
Qui mettrait le comble à sa gloire.
Flatté par ce conseil perfide, autant que faux,
Pour déclarer la guerre aux autres animaux,
Le lion apprêta sa griffe et sa denture :
Mais, ceux-là prévenus, se mettent en mesure,
De si bonne manière, et font tant et si bien,
Que du licn, les coups et la furic,
Poussés jusqu'à l'excès, ne servirent à rien ;
Il perdit son temps et sa vie.
L'âne qui le premier l'avait d'un coup de pied,
Estropié,
Avec juste raison réclame son salaire,
Disant qu'avant tout autre il doit être payé.
Ton salaire, imbécile, attends, vil téméraire,
Lui dirent en courroux les meneurs de l'affaire,
Tu l'auras sans tarder ; là dessus, un gros loup
Fondant sur le grison, l'étrangle d'un seul coup.
C'est ainsi que les grands partagent d'ordinaire,
Entre eux et les petits, le profit d'une affaire.