Qu'un jeune Bonze célèbre
Le trépas d'un Mandarin !
Je fais l'oraison funèbre
De la Mouche et du Cousins
L'un d'Icare eut le destin,
L'autre celui de Grégoire.

La Mouche cherchant à boire
Voit un Verre à moitié plein !
Elle y vole avec courage.
Mais elle hésite à l'abord,
Et j'arrêtant sur le bord
Semble craindre le naufrage.
Bientôt cédant au désir,
Elle en boit, se désaltère,
Puis en boit pour le plaisir :
C'était du vin de Madère !
Encore, encore.... A la fin
Elle chancelle, elle tombe
Dans cet océan de vin,
Se débat et puis succombe.
Le Cousin la voit mourir,
Et se met à discourir.
Quelle liqueur meurtrière !
Fi donc ! c'est à la lumière
Qu'on trouve la volupté,
Le vin n'a jamais tenté
Qu'une âme vile et grossière
Qu'une Bougie a d'appas !
11 dit et vole autour d'elle,
Le Pauvret s'y brûle, hélas,
Tantôt les pieds, tantôt l'aile.
Avec peine il se soutient.
Cependant il y revient ;
Il tourne, retourne encore,
Et la flamme le dévore.

Insectes malheureux, que je plains votre sort !
Par une imprudence extrême,
Vous avez trouvé la mort
Dans le sein du plaisir même,
Souffrez que dans ces vers déplorant vos destins
Je dise à votre gloire, ils sont morts en Humains.

Livre III, fable 3




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