Nous avez assez vanté
Philomèle en liberté
Qui charmait jusqu'au feuillage ;
Peignons Rossignol en cage,
Non pas celui qu'a chanté
Du Vergier ou La Fontaine
Quand sur les bords de la Seine
Ils prêchaient la Volupté
Mais Rossignol-Philomèle
Sœur de Progné-l 'Hirondelle.

Errante au gré de ses douleurs,
Et de Térée encor déplorant les fureurs,
Philomèle se trouva prise
Dans des filets ; nouveaux malheurs ?
Dans une Cage elle fut mise
A côté du Pivert et le petit Damon
Attiré dam ces lieux par la douceur du son,
Applaudit en sautant, comme on fait à son âge.
Ah que c'est bien chanté ! Qui de ces deux Oiseaux.
Papa, que je les voie ! Est-il grand ? Sont-ils beaux ?
Et le Père aussitôt rapprochant de la cage,
Pourrais-tu deviner qui formait ce ramage ?
L'Enfant, sans se laisser interroger deux fois,
Montre au doigt le Pivert. C'est lui, c'est lui, Je gage
S'il le faut, mon Tambour et mon Cheval de bois :
C'est lui sans contredit, ou je ne suis pas sage.
Mais voyez donc, qu'il est charmant !
Jaune et vert à la fois, rouge encore ! Ah vraiment,
Je ne m'étonne plus qu'il ait un si beau chant :
Sa voix s'accorde à son plumage.
Voila le beau Chanteur, oh que je le vois bien !
Pour l'autre sa couleur obscure
Marque assez qu'il n'est bon à rien.

Ce penchant est dans la nature,
Et l'on juge souvent de l'esprit et du cœur,
Sur l'habit ou sur la figure.
On voir Lindor chamarré de dorure,
C'en est assez, Lindor est connaisseur.
Valère est un homme ordinaire,
Valère est applaudi partout !
Peut-on s'en étonner ? La raison en est claire,
Ses cheveux sont toujours rangés du dernier goût ;
Trop heureux le siècle où nous sommes !
Une boucle suffit pour faire de grands hommes !

Livre III, fable 1


Un sujet très exploité par les fabulistes. On pourrait le ressortir aujourd'hui sans problème.

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