D'un vieux Conteur, je tiens encor le fait,
Que bien vous conterai, si que vouliez l'entendre.
Colin avait prêté son chaudron à Drouet,
Qui point trop ne mettait de hâte à le lui rendre. હૈ
Colin va le trouver, un jour, en sa maison :
Compère, et mon chaudron ? - Compère, quel chaudron ? —
Eh ! mais, Compère, tu veux rire,
Avec ton quel chaudron ? Te le faut -il décrire ?
C'est ce chaudron tout neuf, et şi large, et și haut,
Que bien tu m'as gardé, quoiqu'il me fit défaut,
Deux grands mois ; ce chaudron,... mon chaudron, pour tout dire. —
Ah ! que n'es-tu prêcheur ! Compère, tout de bon,
Tu ne prêcherais que chaudron. —
Allons, Drouet, rends -moi mon chaudron, je te prie.-
Et toi, Colin, allons, trêve de raillerie :
Je n'ai point ton chaudron. - Cent fois si. -Cent fois non.-
Ah ! fourbe !... Ah ! déloyal !... Par Judas, ton Patron,
Dût-on te pendre, et te rependre,
Force te sera bien, maudit, de me le rendre !
Et, voilà Mons Colin, qui, sans plus s'arrêter,
Court dénoncer Drouet, et vous le fait citer
Par-devant Bodion, un bien bon Juge, un Juge
Comme il n'en était pas, même avant le déluge.
Donc, au jour assigné par la citation,
Tous deux présents, Colin, pour commencer l'affaire,
Expose que Drouet lui retient son chaudron ;
A quoi Drouet repart, sans le moins se défaire,
Que possible autrefois, mais que, pour ce jourd'hui,
Il n'a point de chaudron à lui.
Or, le bon Bodion doucement lui commande
De jurer haut, si que bien on l'entende,
Et sur sa part du Paradis,
Qu'il n'a ce chaudron. Lui, qui, petite ne grande,
N'y prétendait de part, non pas vous dis
A ce chaudron, -se met en devoir, le digne homme,
De jurer hardiment ; et, comme
Bien il jurait, Colin vous lui disait tout bas,
En le tirant bellement par le bras :
Drouet, ne jure pas ; Drouet, tu perds ton âme...
Mais, Drouet, sur le même ton :
Possible ; et toi, Colin, toi, tu perds ton chaudron.
Vous riez, et, pourtant, c'est le trait d'un infâme :
Quoi, se jouer ainsi de la foi du serment !
Quoi, braver à ce point le droit d'obédience,
Que Dieu donne sur nous à notre conscience !
Mais, cette voix de Dieu n'est rien apparemment,
Qui, nous venant du cœur, nous crie incessamment :
« Ne fût-ce que pour une obole,
Gardez-vous d'abuser jamais de votre foi !... »
Ah ! je le dis sans hyperbole,
Frères, du monde entier, la paix tient, croyez- moi,
Au respect que chacun montre pour sa parole.