Ce n'est, dit-on, point l'habit
Qui fait le Moine. Est-ce le reliquaire
Qui fait le Saint ? Je vais, à beau crédit,
Pour cette fois, vous prouver le contraire
C'était dans la ville d'Amiens,
En l'an.... Mais, l'an ne fait rien à l'histoire ;
Je précise le lieu simplement, et je tiens
Qu'il suffit de cela, pour qu'on doive me croire.
Certain Abbé... - Voilà, pour le coup, selon moi,
Voilà bien un témoin vraiment digne de foi,
Et propre à contenter tout esprit rigoriste... —
Cet Abbé donc étant illic , on lui montra
La tête de Saint Jean-Baptiste,
Que la foule venait, avec grand vénéra,
Baiser et rebaiser. De la baiser moi- même,
Dit-il , en la baisant, je devrais m'excuser ;
Car, c'est bien la cinq ou sixième
Que j'ai l'honneur de baiser !
Du fait que je viens de déduire ,
N'allez-vous point malignement induire,
Que je mécrois les Saints ? Non, non, changez d'avis :
Je crois à tous les Saints qui sont au Paradis !
Mais, quant à l'apparat qui touche les reliques,
Chartes et preuves authentiques,
C'est ce que, Dieu merci, je n'examine point ;
Et, je me donne loi d'en user, sur ce point,
Ainsi que le prescrit notre Mère l'Église.
Sans donc trop m'enquérir si l'on fait marchandise
De chefs, de pieds, de mains de soi-disant Élus ;
Fût-ce ceux de Satan, qu'un Juif nous eût vendus
Pour les restes sacrés ou de Paul ou de Pierre,
Moi, je les tiens pour tels, pour tels je les vénère :
Il n'est que de dresser alors sa volonté.
L'Église dit, non point : « Honore ce qu'enserre
Cette châsse » ; mais bien : « Adresse ta prière
À celui, dont, autant que je l'ai constaté,
Tel ossement doit être en icelle abrité ! »
C'est le Saint que je prie, et non point sa poussière.
Le mot de notre Abbé, pour si bon qu'on le tînt,
Bien loin que de ma foi le dogme en soit atteint,
Me vient tout à propos servir de corollaire :
Ce mot, que prouve-t-il, sinon que reliquaire
Ni reliques ne font le Saint ?