Un jour, une Once 1 nettoie un grand terrain dans la forêt pour y bâtir une maison à son usage. Après l’avoir nettoyé des arbres qui l’encombraient, elle enfonce les pieux, et s’en va, en disant: « Demain, je reviendrai et je couvrirai la maison »
Un Bouc vient à passer par cet endroit;.il aperçoit le terrain tout préparé et les pieux enfoncés : « Puisque je trouve ces pieux déjà enfoncés, se dit-il, je m’en vais me bâtir une maison. » 11 se met à l’œuvre et couvre la maison.
Le lendemain, l’Once revient. « Je vois, dit-elle, que Dieu m’aide: je vais faire les portes. »
Le Bouc arrive après, et, voyant les portes, il s’écrie :
« Je vois que Dieu m’aide, je vais terminer la maison. » Et il procède aux derniers aménagements.
D’Once revient, et dit: « Je vois que Dieu a terminé ma maison. Je Vais m’y installer. »
Elle s’y installe, en effet. Le Bouc arrive et il la trouve installée. Il s’y installe à son tour. Ils se regardent. Le Bouc dit pour lui faire peur: « Quand je dresse ma barbe, c’est que je suis en colère. » — « Quand je dresse mes crocs, dit l’Once à son tour, c’est que je suis en colère. » Ils passèrent ainsi plusieurs jours ayant peur l’un de l'autre.
A la fin, l'Once sort pour chasser, et rapporte un bouc qu elle a tué. Le Bouc se montre tout triste, et n’en mange pas. Le lendemain, il va à la chasse à son tour, et rapporte une once qu’il a trouvée morte. L’Once se montre toute triste et n’en mange pas.
Depuis lors, ni l’un ni l’autre ne dormait plus, s’observant à chaque instant. Finalement, le Bouc, qui n’est pas fort pour veiller, s’endort un beau soir sur le morceau de bois où il était perché. Dans son sommeil, il tombe. L’Once, entendant du bruit, croit que le Bouc se jette sur elle, et fait un bond. Le Bouc à son tour s’imagine que l’Once saule pour le dévorer. Ils se mettent à courir tous les deux, l’un d’un côté, l’autre de l’autre. Ils courent encore, et la maison est restée inhabitée.
Le genre Felis compte un grand nombre d'individus auxquels les Brésiliens donnent le nom générique d'Once, et qu'on appelle communément en Europe le jaguar. On y connaît l'once commune, l'once noire, l'once à poil roux, l'once à poil gris et blanc, l'once maracajà, etc.
Cette fable a été recueillie par l'auteur en Amazonie.