Peut-on penser encore à ces chevaux poudreux,
Tout haletants, couverts d'écume,
Qui par une heureuse coutume,
Couraient toujours deux à deux,
Chevaux de poste enfin ; alors qu'abandonnée
Par les chemins de fer leur route est détrônée ?
Peut-on vanter leurs services passés ?
Eh bien, oui, je dois dire encore
Une de leurs vertus que ne veux qu'on n'ignore.
Qui n'a vu qu'une fois lancés
Ils traversaient la ville ou le village,
Sans broncher, sans être inquiets
De ces misérables roquets
Qui par leurs aboiements saluaient leur passage.
De leur insouciance en ce point, je le crois,
On a fait un proverbe ; on disait autrefois,
D'un homme que le bruit pas plus que la menace
Dans son chemin n'arrêtaient nullement,
Qu'il était, à bon droit tenace,
Bon cheval de poste vraiment.
Ce proverbe à l'instant je viens de le relire,
Dans l'histoire de Frédéric ;
Il savait bien lui, quoi que l'on put dire,
Aller au but ; aussi quand on revire,
Quand sur des aboiements qui font que l'on chavire,
Je vois broncher plus d'un homme public ;
Je dis : écartant ceux qu'en chemin on aposte,
Que n'est-il bon cheval de poste ?