Deux jeunes Paons se promenaient,
Et, tout.en : cheminant, ensemble discouraient,
Raisonnaient et philosophaient.
L'un d'eux dit assez haut : « Chose bien singulière !
J'entends dire partout que notre race est fière ;
Sans cesse on me corne au tympan
Ce proverbe : Il est fier, orgueilleux comme un Paon.
Ceux qui tiennent un tel langage,
Sont des jaloux ;
Ils seraient, j'en suis sûr, beaucoup plus fiers que nous,
Si les dieux leur avaient donné notre plumage.
Un Coq, un méchant Coq, misérable avorton,
Lève plus haut que nous la crête.
Tiens ! j'en vois un là-bas au fond de ce vallon,
Causant avec une Poulette.
Quelle démarche si ère et quel regard hautain !»
La Poulette entendit ce discours* et soudain
Le rouge lui monte à la tête.
Elle accourt vers les Paons, les toise bravement,
Et leur dit assez sèchement :
« La fierté, messeigneurs, est chose pardonnable
A celui
Qui, comme lui,
Est courageux et redoutable,
A le cœur haut placé, grand, et porte en ce cœur
Le sentiment de sa valeur.
C'est même dans ce cas une vertu louable ;
Mais, je vous le dis entre nous ;
Ce n'est plus qu'un vain étalage,
Lorsque l'on fait consister comme vous :
Tout son mérite en son plumage. »