Le Rossignol et le Serin Gabriel-T. Sabatier (19ème)
Le Rossignol, ce roi des chanteurs du bocage,
Un certain jour, se lamentait
De ce que possédant un ravissant ramage
Que chacun exaltait,
Il avait par malheur un déplaisant plumage.
« Hélas ! s'écriait-il, les plus belles couleurs
Parent des oiseaux sans mérite ;
Et moi, moi le roi des chanteurs,
Lorsque je vois de loin de joyeux laboureurs,
Sachant que je suis laid, je m'enfuis au plus vite ! »
« Mon brave rossignol, lui dit un vieux serin,
Si tu pouvais avair un superbe plumage
Et conserver ton doux ramage,
Tous les oiseaux, c'est bien certain,
Mourraient de dépit et de rage !
Jamais rien de parfait ne se trouve ici bas :
Si le lion est fort, le singe a de l'adresse ;
La nature ne donne pas
A tous les animaux la force, la finesse,
La beauté, les talents, la voix enchanteresse :
Ainsi ne vois donc rien d'étonnant dans ton cas. »
