La Mère qui se fait peindre Honoré Antoine Richaud-Martelly (1751 – 1817)

Un fameux Peintre employait son talent
À peindre une assez vieille femme :
Quand il crut voir le portrait ressemblant,
Il l'apporta. La bonne dame
Voulut qu'il fît les yeux plus beaux,
Et surtout la bouche moins grande.
L'Artiste complaisant sourit à sa demande,
Et corrigea tous ces défauts.
La bouche et l'œil sont bien : mais, lui dit-elle encore,
Je dois avoir le teint plus frais :
Je ne reconnais point mes traits
Sans la fraîcheur qui les colore.
Le Peintre, une seconde fois,
Cède et rajeunit le visage.
Allons, dit-elle, je prévois
Que je serai contente de l'ouvrage ;
Tâchez de mettre seulement
Dans la taille plus d'élégance,
Dans le maintien plus d'assurance.
Ce fut pour lui l'ouvrage d'un moment.
C'est un présent pour la famille,
Vous sentez bien qu'il doit être parlant.
Elle le trouva ressemblant,
Quand il fut celui de sa fille.

Livre I, fable 4




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