Le Tarin et le Hérisson Ivan Krylov (1768 - 1844)

Vers l'aube, au fond des bois, goûtant la solitude,
Un timide tarin gazouillait ses chansons,
Dont l'écho des bosquets répétait seul les sons :
Il chantait pour chanter, sans art el sans étude.
Phébus, sorti du sein des mers,
Des flots de sa lumière inondant la nature,
Vint vendre tout à coup la vie à l'univers,
Et, dans les bois remplis d’un frais et doux murmure,
Le rossignol joyeux chanta ses plus grands airs.
Le tarin se taisait, D’'un ton plein @ironie
Un hérisson lui dit: « Ne sais-tu plus chanter ?
« Quand le soleil parait, pourquoi donc t'arrêter ?
— Pour chanter de Phébus la splendeur infinie,
Répondit le tarin en soupirant tout bas,
Il faudrait des accents que mes chansons n’ont pas,
« Et trop faible est mon harmonie ! »

Si ma muse à Pindare est pris son luth divin,
A la gloire aussi, moi, j'aurais osé prétendre;
Ma voix, qui pour l'écho pleure et soupire en vain,
Aurait chanté pour Alexandre !

Livre I, fable 12




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