Les Chiens, les Guêpes et le Hérisson Jean-Jacques Boisard (1744 - 1833)

Les Guêpes autrefois, avec un grand courage,
Firent la guerre au Hérisson.
L'histoire né dit point à quelle occasion ;
Mais ils étaient voisins, que faut-il davantage ?
L'air résonnait à l'environ :
Dix mille contre un seul ! elles vont faire rage.
(Elles ne comptaient pas le nombre de ses dards)
Guêpes sur l'ennemi fondent de toutes parts,
Guêpes payèrent cher cette sotte équipée.
Le Hérisson, seul contre tous,
Contre chaque Adversaire allongeait une épée ;
Et de longueur, Dieu fait et s'il parait les coups.
Les escadrons ailés d'eux-mêmes s'enferrèrent,
Et par centaines s'enfilèrent.
Le combat ne finit qu'avec les combattants.
Le Hérisson chargé d'ennemis expirants
Remportait à la fois l'armée et les bagages,
Il marchait à gros équipages...
Mais, Ô d'un grand triomphe infortuné retour !
Chemin faisant il rencontre une meute ;
Et tous les Chiens d'aboyer à l'entour.
Grande émeute !
Il se met en défense, il dresse ses piquants :
On l'attaque ; il tient ferme et par mille blessures
Il venge les moindres morsures.
Et cependant les assaillants
Redoublent leurs efforts ainsi que le tapage.
Tayaut qui s'est piqué ne se sent plus de rage ;
Il revient au combat ; percé de mille dards,
Il rejette en fureur et ressaisit sa proie :
La douleur, la cruelle joie
Étincellent dans ses regards ;
Son sang coule et se mêle au sang de sa victime :
Le Hérisson mourant lui dit : Que t'ai-je fait ?...
Il expire et Tayaut dit aux Chiens : En effet
Je ne fais pas quel est son crime.

Livre III, fable 24




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