Les Funérailles Ivan Krylov (1768 - 1844)

En Egypte, dit la légende,
Pour donner plus d'éclat au deuil,
On faisait suivre le cercueil
Par des pleureuses de commande.
Un richard très- connu s'acheminant un jour,
De cette courte vie à l'éternel séjour,
Au bruit des sanglots, dans la ville,
Par ces pleureuses escorté.
Vers son dernier et froid asile,
Pompeusement était porté.

Touché d'un désespoir qui paraissait sincère,
Un passant étranger crut que, sans contredit,
Il voyait des enfants pleurant la mort d'un père.
Des femmes aussitôt il s'approche et leur dit :
u Bien vive serait votre joie
Si ce mort renaissait ; je suis magicien ;
Vers vous c'est le ciel qui m'envoie,
Et vous verrez bientôt quel pouvair est le mien.
Je sais l'art d'évoquer les âmes,
Et vais rendre la vie au mort.
— Notre père, criaient les femmes,
Prends donc pitié de notre sort ;
Nous te faisons une prière :
Que ce richard par ton secours
Vive encore au moins pour cinq jours,
Va qu'il soit de nouveau privé de la lumière.
Ce mort, de son vivant, n'a su faire aucun bien ;
S'il retourne dans sa demeure.
Il ne peut être utile à rien
Tandis que derechef on nous paiera très-bien
Si de nouveau tu veux qu'il meure. »

Que de riches ne voit-on pas
Sur qui pareil espoir repose !
Il n'est en eux que leur trépas
Qui soit utile à quelque chose.

Livre VIII, fable 5




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