Les Passants et le Chien Ivan Krylov (1768 - 1844)

Deux amis en causant cheminaient, vers la nuit,
Quand d'une porte un chien s'élance a leur passage,
Et s’agite autour deux, aboyant à grand bruit.
Il en vient deux, puis trois, des corps du voisinage ;
Bientôt toute une meute en jappant les poursuit.
Au bout d'une minute à peine,
On en comptait la cinquantaine.
Déjà l'un des amis s'est armé d'un caillou.
« Eh ! que fais-tu, mon cher ? lui dit autre, es-tu fou ?
Tu crois par ce moyen les apaiser sans doute ;
Mais ils en vont crier plus fort !
Sans plus les regarder, poursuivons notre route ;
Je connais leurs façons, tu verras si j'ai fort. »
Ils n'ont pas fait cent pas, que déjà, hors d'haleine,
Des roquets épuisés en efforts superflus
La voix se fait entendre à peine ;
Quelques instants plus tard, aucun n’aboyait plus.
Sur les pas du talent qui marche solitaire
La voix de l'envieux toujours se récriera :
Poursuis ta route, il aboiera,
Mais il finira par se taire.

Livre II, fable 12




Commentaires