Dans les forêts, ou déserts de l'Afrique,
Climats au-delà du tropique,
Lieux habités par des tigres cruels,
Si redoutables aux mortels ;
Un homme errant dans ce pays sauvage,
Echappé seul au péril du naufrage,
Implorait le secours de la divinité,
Recours du malheureux dans son adversité.
C'est en vain qu'il cherche un asyle ;
Pressé par le besoin, chancelant et débile,
Il était prêt à succomber ;
Mais un tigre paraît, il voulut se sauver.
L'animal furieux, d'un saut le joint, l'arrête :
Au moment qu'il allait dévorer sa conquête,
L'homme lui dit : prends pitié de mes jours ;
Si je pouvais en prolonger le cours,
Et si le sort me devenait propice,
Je saurais, par mes soins, m'acquitter du service
Que me rendrait ta générosité,
De m'accorder la vie en cette extrémité.
Je vois de tes pareils le trompeur artifice,
Répondit le fier animal :
Tu promets tout, dans ce moment fatal ;
Les animaux, qu'immola ton caprice,
Ont-ils fléchi ta dureté ?
Homme barbare et plein de cruauté !
Tu règnes en tyran sur tout ce qui respire ;
Tes malheureux sujets maudissent ton empire :
Cent fois plus féroce que nous
Tu frappes sans pitié, tout tombe sous tes coups :
Je n'écoute point ta prière :
Qui peut compter sur ce que tu promets ?
Ta mort finira la carrière
De tes crimes, de tes forfaits.
Si nous voulons désarmer la vengeance
De l'ennemi qui nous poursuit,
Par nos vertus, qu'il soit instruit
Que nous méritons sa clémence.