La Fable et le Fabuliste Jean-Hubert Hubin (1764 - 1833)

LA FABLE.

Qu'exiges-tu de moi, rimeur opiniâtre ?
Pourquoi m'importuner par d'inutiles vœux ?

LE FABULISTE.

De grâce, traitez mieux un amant idolâtre.

LA FABLE.

Jamais tu n'obtiendras de moi ce que tu veux.
C'est montrer peu de sens que d'oser y prétendre.
Jadis en France, un seul, par son génie heureux,
A tous ses goûts m'obligea de me rendre.
De ses imitateurs le concours fut nombreux :
Aux vœux de quelques-uns je daignai condescendre.
filais c'en est fait ; près de moi tout accès
A tout autre aspirant est fermé pour jamais.

LE FABULISTE.

Il l'est du moins pour moi ; ma muse en est certaine,
Et je suis aussi loin d'imiter Lafontaine
Que d'espérer de vous quelque faveur.
Mais enfin je sens dans mon cœur
Je ne sais quel désir de prêcher mes semblables,
Grands parleurs de raison sans être raisonnables,
Et je voudrais, en traits nouveaux,
En piquantes allégories,
Les chapitrer sur leurs folies,
Sur leurs erreurs, sur leurs défauts,
Sur leurs malheurs enfin, fruits de leur imprudence.

LA FABLE.

Ce dessein prouve bien ton peu d'expérience.
Ignores-tu qu'en prose ainsi qu'en vers
Mille autres, renommés par leur sage éloquence,
De ta race n'ont pu corriger les travers ?
L'homme, infatué de chimères,
Ferme l'oreille aux conseils du bon sens.
Les vices sont héréditaires ;
Un sage te l'a dit : « les sottises des pères
Ne corrigent pas les enfants. »





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