Hé bonjour donc, ma chère sœur !
Disait d'un air assez affable,
Un jour la satire à la fable.
Peut-on, dit celle-ci, faire une telle erreur
Quoi ! vous osez vous dire ma parente !
Est-ce que j'ai tenu des discours indécents ?
Dieu merci, je n'ai pas cette humeur dénigrante
Qui vous rend odieuse aux gens.
C'est bien à tort prendre la mouche,
Et l'on peut vous fermer la bouche,
Répondit l'autre en ricanant.
Je parle, il est vrai, franchement ;
Si je connais un fripon, je le nomme,
Et je dis qu'un chat est un chat.
Mais avec votre ton naïf et délicat,
Sous la peau de ce chat vous désignez un homme,
Après avoir de l'animal
Peint le penchant à la rapine,
Et vous croyez n'avoir fait aucun mal ?
Fort aisément tout cela se devine ;
On a beau se cacher, le diable n'y perd rien.
A mon égard ne soyez pas ingrate ;
Car convenez que de ma patte,
Parfois vous vous servez très- bien ;
Vous n'en êtes que plus piquante.
L'espèce humaine est de son naturel,
Vous le savez, assez méchante ;
N'allez donc pas faire si de mon sel.
Ainsi parla dame satire,
A ce mot de piquante, on entendit soudain
Sous son masque la fable rire ;
Et même ce rire malin,
Si l'on en croit la calomnie,
Fit un peu suspecter son ton de bonhomie.