Le Chien et le Chat Jean-Jacques Porchat (1800 - 1864)

Habitants du même logis,
Un Chien, un Chat, dès leur enfance,
Aimés, caressés, bien nourris,
Laissaient entrer les gens et trotter les souris,
Et vivaient en rentiers, sans gagner leur pitance.
Leur maître eut un procès, succomba, fut ruiné :
De vider sa maison ordre lui fut donné .
Le Barbet le suivit, mais non pas son confrère.
« Avec nous, dit le Chien, pourquoi ne pas venir ?
Des bienfaits du patron tu dois te souvenir ;
Peux-tu dédaigner sa misère ?
- Je le plains, dit le Chat ; mais mon cœur attendri
Ne peut quitter ce lieu chéri,
Où de mes premiers ans tout m'offre encor l'image.
Puis je deviens au maître incommode, aujourd'hui ;
Désormais, je présume, il vivra de ménage ;
Où prendrait-il pour moi, s'il n'a pas trop pour lui ?
- Tu crains de le gêner ? Quelle délicatesse !
Répondit l'autre avec dédain.
Hypocrite, tu veux te déguiser en vain.
Va, l'infortuné qu'on délaisse
A plus besoin d'une caresse
Encor que d'un morceau de pain.

Livre I, fable 1




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