Un jeune rat, nouvel hôte du monde,
Errait à l'aventure, et se trouvait heureux,
De jouir à son gré de la clarté des cieux,
Et de tous les plaisirs de la machine ronde ;
Lorsqu'il vit tout-à-coup, retiré dans un coin,
Un chat, dont la première affaire,
Était de digérer, et puis de ne rien faire,
Et qui semblait alors n'avoir point d'autre soin
Que de se reposer, assis sur son derrière……….
Voilà certes, dit-il, un bien doux animal !
C'est un saint ; je lui dois toute ma confiance ;
Ce serait l'outrager que d'en craindre du mal,
Et je veux avec lui faire ample connaissance.
Il s'en approcha donc ; mais le coquin de chat,
Allongeant sa grifse traîtresse,
S'en saisit aussitôt, avec beaucoup d'adresse,
Et mit à mort le pauvre rat.
Un air sanctifié n'est pas toujours le gage
D'un cœur des passions vraiment désabusé ;
Et tel qui nous paraît un fort saint personnage,
N'est bien souvent qu'un fourbe à nos yeux déguisé.