Vieillard, au front majestueux
Que couronnent de blancs cheveux,
Tu représentes à mes yeux
L’image elle-même des Dieux.
Un bûcheron abattait un vieux chêne,
L’honneur des forêts en son temps,
Mais depuis flétri par les ans,
Ses pieds vieillis le soutenaient à peine
Et son front s’inclinait. Ses superbes rameaux,
Qu’on voyait autrefois par-delà les coteaux,
De leur vaste et sombre feuillage
Ombrager tout le voisinage,
Desséchés, languissant n’offraient plus aux troupeaux,
Contre les feux du jour, de frais et doux asiles;
Dès long-temps même les oiseaux
Ne venaient plus chanter sur ses branches stériles;
Il était vieux, chacun l’abandonnait:
Et noire bûcheron lui-même,
Sans pitié pour son âge extrême,
L’abattait. De ses coups la forêt résonnait;
Et le malheureux chêne
Pleurant sa gloire éteinte et sa chute prochaine,
En vain au bûcheron disait, pour l’attendrir :
« Que ne me laisses-tu de moi-même mourir?
Et pourquoi cette insulte, hélas! à ma faiblesse?
Regarde, quelques jours encor, quelques instans,
Je tombais sous la faulx du Temps ;
Que ne respectais-tu jusque-là ma vieillesse?
Jadis, quand de ces lieux je faisais l’ornement,
Devais-je un jour m’attendre à pareil traitement?
Ingrat, sans respect pour mon âge……»
D’âge que parles-tu, reprit le bûcheron,
Quand désormais lu n’es bon
Qu’à descendre au sombre rivage ?
Dis-moi, que gagnerais-je à te laisser sur pied?
Eh rien ! ne viens donc plus me parler de pitié. »
L’ingratitude, hélas! sera toujours de mode;
Des trois quarts des humains l’intérêt fait le code.