Certain jour, par hasard, un dogue,
Grand ami de l’étude et savant géologue,
En explorant carrières et terrains,
Au risque de se rompre ou la tête ou les reins,
Découvrit un trésor :
Un vieux coffre rempli de vieilles pièces d’or :
« Par Jupiter ! » dit-il, « ah ! quelle bonne aubaine !
» Emportons-le chez nous : il en vaut bien la peine.
» Mais c’est en vain, ma foi, que j’ai su le flairer,
» Si je ne sais, hélas ! comment le déterrer ! »
Le cas l’embarrassant et ne sachant que faire,
Il avise un renard, vieux matois, fin, adroit,
Mais respectant fort peu la justice et le droit,
Et lui conte l’affaire :
« Compère, » lui dit-il, « prête-moi ton concours ;
» Car je ne puis, sans ton secours,
» Arracher le trésor. Pour loi, quel avantage !
» En sus de mon amitié,
– » Je t’en donnerai la moitié,
» Et lu pourras alors rouler en équipage. »
Quelle chance pour un renard !
Il va, sans doute, je le gage,
La saisir sans retard.
Non ! non ! croit-il au bien celui qui fait le mal ?
Quand soi-même on emploie et ruse et fourberie,
On ne veut voir partout que fraude et duperie.
« Pas si sot, » lui répond le menteur animal ;
« Va, j’ai le nez trop fin pour ne pas voir le piège
» Caché sous ce manège,
» Et je sais que jamais le chien
» Au renard n’a voulu de bien. »
Le dogue repoussé va trouver la belette…
« J’accepte,
» lui dit la finette ;
» Je connais la probité,
» Et pour moi ta parole est une vérité. »
L’affaire convenue, on court sus à l’ouvrage,
Et du coffre mis à nu,
Egalement on partage
Entre soi le contenu.
Pour le renard, quelle déconfiture,
En apprenant l’aventure !
Il comprit, mais trop tard, que jamais, quel qu’il soit,
Il ne faut estimer le prochain d’après soi.