Un Villageois, menant ses bœufs au pâturage,
Fut mordu jusqu'au sang par un Chien furieux.
Il était superstitieux,
Ayant ouï dire au village
Que s'il donnait à l'animal
A boire de son sang, il guérirait son mal,
Il le crut. Or, le sang coulant de sa blessure,
Il en imbibe un peu de pain,
Et l'offre à l'animal, auteur de la morsure,
Qui se jette dessus et l'avale soudain.
Notre Chien y prend goût : son appétit s'enflamme ;
Sur le pâtre, saisi d'épouvante et d'horreur,
Il se jette avec rage, il lui fait rendre l'âme,
Dans tout son sang enfin assouvit sa fureur.
Quiconque d'un méchant a reçu quelqu'offense,
Devra s'attendre à pareil traitement,
S'il lui donne une récompense
Au lieu d'un juste châtiment :
Car jamais la reconnaissance
N'entra dans le cœur du méchant.