Deux Enfants trouvèrent des noix,
Toutes fraîches encore, objet de friandise.
L'un d'eux était rusé ; l'autre, non. Sur leur prise
Grande dispute entre eux ; mais notre fin matois
Du simple trompa la bêtise.
« Entre amis, lui dit-il, on doit avec franchise
Faire des partages égaux :
Suivant ces principes loyaux,
Je ne prends ma moitié qu'en vous donnant la vôtre. »
Il casse donc les noix, se garde les cerneaux,
Et laisse avec le brou les coquilles à l'autre.
Ce dernier cacha son ennui,
Fort mécontent du bon apôtre.
« C'est un tour, disait-il, qu'il nous joue aujourd'hui ;
Nous savons sa finesse ; il connaîtra la nôtre.
Si l'occasion vient jamais,
J'empêcherai les récidives. »
Elle vint quelque temps après.
Ils trouvèrent encore ensemble des olives,
Doux fruits qu'avec tant d'art on apprête dans Aix.
Entre eux nouveaux débats : ici notre niais
Crut pouvair rendre la pareille :
Ami, ton exemple est ma loi »,
S'écria-t-il d'abord, pensant faire merveille ;
« Songe au partage égal que l'amitié conseille :
C'est ta règle : aujourd'hui le dedans est à moi ;
Quant à l'écorce, elle est pour toi. »
L'ami, que cette part contente,
Des olives avec plaisir
Prend l'enveloppe succulente ;
 l'autre, selon son désir,
Il laisse les noyaux. Ainsi donc l'imbécile
Deux fois de suite se méprit,
Tout en se croyant fort habile.

L'expérience est inutile
 quiconque manque d'esprit.

Livre I, fable 7




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